René Hénaff, 6 années au 48e RI de Guingamp

Coll. MH Ollivier

Coll. MH Ollivier

René Le Hénaff naît le 19 novembre 1893 à Kerousaillet, Kergoat. Il est le quatrième des 7 enfants de Hervé et de Marie Louboutin. Lors du recensement de 1911, il a 18 ans et est cultivateur chez son père à Kerousaillet.

Recensé pour le service militaire, il est bon pour le service. Cheveux et yeux châtains, il mesure 1,58m et a un niveau d’instruction de fin d’étude primaire (certificat d’étude).

Le 27 novembre 1913, il intègre le 48e régiment d’infanterie de Guingamp pour faire son service militaire (matricule 1600). C’est là que le trouve la déclaration de guerre, début août 1914. Il y restera jusqu’au 2 septembre 1919, soit presque 6 années, pendant lesquelles il a passé seulement quelques mois dans le régiment frère du 48e, le 71e régiment d’infanterie de St Brieuc.

Blessé en septembre 1914

A la suite de la mobilisation générale, le 5 août, le 48e régiment d’infanterie embarque à Guingamp pour Vouziers dans les Ardennes. Les Allemands faisant mouvement par la Belgique pour contourner l’armée française, les régiments français montent vers le Nord pour stopper cette invasion. A partir du 10 août, le 48e régiment marche, avec le 10e corps d’armée, en direction de Namur en Belgique. Le corps d’armée marche en deux colonnes, la 19e division d’infanterie regroupant les 37e et 38e brigade forme la colonne de gauche. Le 48e régiment d’infanterie, dans lequel se trouve René Hénaff, compose la 37e brigade d’infanterie, avec le 71e régiment d’infanterie de St Brieuc.

Le 17 août, à marche forcée, les troupes entrent en Belgique et atteignent la Sambre entre Namur et Charleroi (bataille des Frontières)

Dès le 20 août, la 19e division est engagée dans les combats. La 37e brigade livre bataille le 21 août au soir à Arsimont pour tenter rejeter les Allemands sur la rive Nord de la Sambre. C’est au cours de cette bataille pour la prise d’Artimons que tombe le 1er soldat de Quéménéven, Alain Daigné de Lendu, soldat au 71e régiment d’infanterie.

Les combats s’interrompent avec la nuit et reprennent le lendemain. Mais débordée et après de lourdes pertes (520 hommes pour le seul 48e), la division se replie.

Talonnées par les armées allemandes, les armées françaises et le corps expéditionnaire britannique reculent en combattant, opérant des contre-attaques localisées et temporaires pour ralentir la progression ennemie, gagner du temps et permettre à Joffre, commandant en chef des armées, de réorganiser la ligne d’attaque. Ce sera la bataille de la Marne à partir du 6 septembre 1914.

Pendant la contre-attaque française, le 48e RI est en deuxième ligne et ne prend part en 1ère ligne qu’à des actions ponctuelles.

Le 14 septembre le régiment arrive à Prunay à l’est de Reims, avec pour mission de dégager le village et pour les 2e et 3e bataillons d’occuper la voie ferrée.

On peut lire dans l’historique du régiment « pendant trois jours nous tenons ferme Prunay sous une avalanche d’obus de 150 et de 220 ». Pendant cet épisode, René Hénaff, alors soldat à la 10e compagnie du 48e RI,  est blessé le 16 septembre 1914, par un éclat d’obus au genou gauche et évacué.

Nommé caporal en 1915

Il remonte au front probablement le 24 avril 1915, et rejoint le 71e régiment d’infanterie dans la région d’Arras. Le régiment vient d’être relevé et cantonne dans les secteurs de Walrus et Wanquetin. LE 10e corps d’armée occupe le secteur jusqu’à fin juillet.

Mi-août 1915, il est déplacé en Argonne où seront livrés quelques rudes combats.

René est nommé caporal le 15 septembre 1915. A ce titre, il supervise 14-15 soldats formant une escouade. L’escouade n’est pas une unité de manoeuvre mais une regroupement comme « une petite famille » pour la vie courante de l’unité (couchage, cuisine et nourriture…).

Croix de guerre avec étoile de bronze en 1916

Coll. MH Ollivier

Coll. MH Ollivier

Le 71e reste en Argonne jusqu’en janvier 1916. René est évacué malade le 11 janvier 1916. Soigné, il est de retour au front le 13 mars, et réintègre probablement le 48e RI de Guingamp. A cette date la 37e brigade est dans le secteur de Verdun où les Allemands ont lancé une terrible offensive le 20 février. Plusieurs attaques et contre-attaques sont menées : Avocourt en avril, Chattancourt fin mai-début juin, le Mort-Homme fin juin, Thiaumont en août.

Le 9 septembre le 48e RI est envoyé en Champagne, à l’est d’Auberive. Le 16 novembre, La 2e compagnie, à laquelle appartient René Hénaff, fait un rapide coup de main. Ce jour-là, après une matinée calme, à partir de midi, des tirs de préparation de l’artillerie sont effectués sur le saillants des Abatis en prévision du coup de main qui doit avoir lieu à 15h00. Les Allemands ripostent avec de grosses torpilles et des bombes à ailettes.

A 14h00, les brèches sont suffisantes dans le réseau de barbelé pour laisser passer les sections d’attaque et les nettoyeurs. L’assaut est donné à 16h00.

Voici ce qu’on peut lire dans le journal de marche du régiment

« La 1ère section d’attaque de la 2e compagnie (…) franchit rapidement l’intervalle qui la sépare de la tranchée Friedechafen et de la tranchée de doublement et établit face au nord son barrage entre les points 101 et 102.

La section des nettoyeurs (section Serbe) partant à 16h10 marche dans les traces de la 1ère et suivant la tranchée du saillant des Abattis marche sur le point 58.

La tranchée est en partie comblée par les tirs de notre artillerie. Deux petits abris dont un de mitrailleuses démolis. Les recherches faites ne permettent de recueillir ni prisonnier ni engin. »

A 16h08 la section du 48e rejoint la section du 71e partie au même moment en direction du point 58. « pas de traces d’occupant ou de débris humain » peut-on lire. « tout fait présumer que les coups de sirènes entendus au début de la préparation par l’artillerie ont été un ordre d’évacuer le saillant des Abatis »

Ce coup de main vaut à René sa première citation à l’ordre du régiment et la Croix de guerre avec étoile de bronze « caporal courageux, dévoué, a montré de l’allant dans l’attaque du 16 novembre 1916 ».

Le régiment est en Champagne jusqu’à mi-janvier 1917.

1917, l’année des permissions

1917 est pour l’armée française l’année des mutineries. En effet, malgré l’échec du Chemin des Dames, l’état-major s’entête à poursuivre les assauts meurtriers. Des mutineries éclatent qui atteignent leur paroxysme au mois de juin. Toutes les armées sont concernées. Une partie des troupes refuse de monter à l’assaut. Des manifestations éclatent dans les gares et les trains de permissionnaires. Des mesures d’apaisement (permissions) et de répression (emprisonnement, exécutions) sont adoptées.

Pour René, 1917 est l’année des permissions. Il obtient une 1ère permission de 7 jours le 2 février 1917, et une seconde toujours de 7 jours le 15 juin 1917 après les rudes combats du Chemin des Dames.

A son retour, le régiment est dirigé sur les éparges.

Début septembre, il est dans le secteur nord de Verdun, cote 344. le régiment occupe les tranchées de la cote 344 pendant 18 jours de préparation allemande en vue d’une attaque qui sera menée le 30 septembre.

« On peut difficilement s’imaginer ce que furent ces 18 jours sur ce terrain de Verdun, où les trous d’obus sont toujours remplis d’eau, où l’odeur cadavérique se mêlait à celle de l’ypérite, où les rares abris allemands que nos canons n’avaient pas défoncés avaient leurs entrées mal orientées, repérées et atteintes très fréquemment par les coups directs de l’artillerie ennemie » peut-on lire dans l’Historique du régiment.

Après un court repos, le régiment se réorganise et prend un secteur difficile proche des éparges.

« Dans ce pays difficile où le bois mort craque sous les pas, les patrouilles et les coups de main sont malaisés. Sans préparation, l’on n’arrive pas à aborder la ligne allemande ; avec préparation, l’on risque de ne pas surprendre l’ennemi qui, ayant perçu nos projets, a fait le vide devant notre attaque. »

René obtient une 3ème permission de 10 jours celle-ci du 20 octobre au 4 novembre 1917.

Croix de guerre avec étoile d’argent en 1918

Mi mars 1918, le régiment quitte le secteur pour l’Aisne où il va combattre sans répit jusqu’au 15 juillet.

Le 4 juillet 1918, René a été évacué pour une blessure accidentelle, un coup de pioche au pied gauche dont la plaie s’est infectée. Il est hospitalisé à l’hôpital auxiliaire n°3 des Sourds-Muets de Poitiers, d’où il part en permission le 20 juillet 1918. Il est toujours caporal à la 2e compagnie du 48e RI.

Billet d'hôpital de René Hénaff. Coll. MH Ollivier

Billet d’hôpital de René Hénaff. Coll. MH Ollivier

 

Pendant cette période, il obtient une citation à l’ordre de la division le 12 juillet 1918 qui lui vaudra la croix de guerre avec étoile d’argent.

René regagne le front le 28 juillet 1818 et participe à la contre-offensive alliée. Le 4 août, le 48e doit franchir la Vesle et continuer le mouvement en direction de l’Aisne.

A partir du 5 août, après les combats sur la Vesle, le régiment revient par étapes à la Ferté-sous-Jouarre, où il embarque en chemin de fer à destination de Ligny-en-Barrois. Il y arriva le 9 août. Jusqu’au 23 août, il va s’y reformer, grâce à des renforts reçus du 341e régiment d’infanterie.

A cette date, enlevé en camions automobiles, il est débarqué dans la région de Corcieux (Vosges), d’où il remonte immédiatement en tranchées.

Il va occuper pendant près de deux mois le secteur réellement calme du Bonhomme.

L’armistice du 11 novembre le trouve à Couvron, au sud de Laon, sur le point d’être engagé une fois de plus.

Des lendemains de l’armistice jusqu’en mars 1921, cinq millions d’hommes rentrent dans leurs foyers de façon échelonnée. Les classes 1912 et 1913, au service militaire avant le début de la guerre, sont démobilisées à l’été 1919 tandis que les dernières classes mobilisées ne le seront qu’en 1920 et 1921.

René est envoyé en congé illimité de démobilisation le 2 septembre 1919 et peut enfin rentrer à Quéménéven.

Après la guerre

René Hénaff épouse Marie Perrine Louboutin le 22 janvier 1922 à Quéménéven. Il est dégagé de toutes obligations militaires le 31 janvier 1939 parce que père de 6 enfants.

Photo de mariage de René Hénaff et Marie Perrine Louboutin. Coll. MH Ollivier

Photo de mariage de René Hénaff et Marie Perrine Louboutin. Coll. MH Ollivier

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